Fiche descriptive
Provenance :
Chez Heim-Girac, à Paris, en 1955;
Acquis sur le marché parisien circa 1995.
Jan Brueghel l’Ancien, également connu sous le nom de « Jan Brueghel de Velours », est le fils de Pieter Brueghel l’Ancien et le frère de Pieter le Jeune. Suivant la tradition familiale, il s’inspire et reprend des compositions de son père. Après le décès de son père, c’est sa grand-mère, Marie de Bessemers, veuve de Pieter Coecke van Aelst, qui prend en charge son instruction artistique. Il collabore aussi avec Peter de Goetking et se fait rapidement une réputation comme peintre de fleurs et de fruits. Après un passage en Italie entre 1590 et 1596, il s’établit à Anvers. En 1609, il est désigné peintre de cour de l’archiduc Albert et de l’Infante Isabelle d’Autriche.
Parmi ses élèves figurent Abraham Govaerts et Daniel Seghers. Il est célèbre pour ses tableaux de fleurs, mais a également réalisé des compositions bibliques, allégoriques, mythologiques, ainsi que des paysages. Plusieurs de ses œuvres emblématiques portent sur le Paradis terrestre et sont souvent peintes sur cuivre.
Notre tableau s’inscrit parmi les compositions bibliques de l’artiste puisqu’il représente le récit de Loth et ses filles qui provient de la Genèse. Après la destruction de Sodome et Gomorrhe, Loth et ses filles se réfugient dans une grotte de montagne. Croyant être les seuls survivants de l’humanité, les filles enivrent leur père et s’unissent à lui dans l’espoir de préserver leur lignée. Dans cette scène, Brueghel s’éloigne de son habituelle prédilection pour les paysages bucoliques ou les scènes florales et se concentre sur le drame humain. Les figures sont placées au premier plan sur la gauche afin de laisser visible le paysage et surtout l’incendie qui illumine le ciel. La palette sombre contrastée par les nuances d’orange et de rouge amplifie le sentiment de désespoir et d’isolement ressenti par les personnages. Plus encore qu’un sujet biblique, Jan Brueghel représente ici une scène d’incendie où il peut librement laisser s’exprimer ses talents de paysagiste dans un décor que les flammes viennent éclairer.
Ce thème de l’incendie est central dans ce tableau mais aussi très présent dans sa production de manière générale. En effet, il traite ce thème dans La Tentation de saint Antoine daté vers 1594 et conservée au musée de Kassel (voir catalogue de l’exposition Pieter Brueghel der Jüngere – Jan Brueghel der Ältere, Flämische Malerei um 1600, Tradition und Fortschritt, Lingen, 1997, n°39, reproduit), puis vers 1595 dans L’incendie de Pentapolis conservé à la pinacothèque Ambrosienne de Milan, Énée fuyant Troie incendiée en portant son père Anchise conservé à l’Alte Pinakothek de Munich, et également dans Loth et ses filles devant l’incendie de Sodome conservé aussi à l’Alte Pinakothek de Munich (voir Kl. Ertz, Jan Brueghel D.Ä. Die Gemälde, Cologne, 1979, n°25, 26, 27, reproduit fig. 137, 135, 136). Tout comme dans notre tableau, les personnages sont secondaires, mis de côté afin de laisser voir pleinement au spectateur le paysage dévoré par les flammes.
Bien qu’il ait rarement opté pour un format rond, on connaît de l’artiste quatre tableaux de ce format sur le thème des quatre saisons peints vers 1594-1596 (voir le catalogue de l’exposition Pieter Brueghel der Jüngere – Jan Brueghel der Ältere, Flämische Malerei um 1600, Tradition und Fortschritt, Lingen, 1997, n°s24 – 27, reproduits).